“Trois facultés sont dites essentielles au développement de la mentalité : l’observation, la concentration, l’action.”
Luc Rochefort
Voilà qui résume bien l’attention… Malheureusement, les acteurs du numérique en ont bien conscience. Dans cet article, nous allons partager des informations sur leurs méthodes aptes à vous aider pour vous en protéger !
Le marché de notre vie…
Imaginons un instant que nous vivons dans un monde où serait analysée en permanence la façon dont fonctionne notre cerveau. Un monde qui utiliserait notre attention comme matière première. Qui nous pousserait à prendre des décisions contre notre volonté pour que des entreprises s’enrichissent. Et même, un monde où nos comportements, nos habitudes, notre manière de penser, nos intérêts, nos passions, nos achats, en somme nos données individuelles et notre vie en quelque sorte, seraient collectés pour être ensuite revendus aux marchés financiers…
Eh bien, ce monde c’est le nôtre !
Patrick le Lay, l’ancien président-directeur du groupe média TF1 nous avait prévenus, il y a déjà deux décennies. Ce propos avait par ailleurs fait polémique. Il était toutefois, malgré son cynisme, d’une grande vérité : « Ce que nous vendons à une célèbre marque de soda, c’est du temps de cerveau disponible ». Cette phrase choc représente en tout point notre réalité. Mais nous parlons là d’un média ancien qu’est la télévision.
Les nouvelles technologies, les nouveaux médias sociaux sont eux à l’avant-garde de ce marché économique. Avec la massification des smartphones, tablettes et ordinateurs, presque tous les êtres humains sont aujourd’hui une part de marché accessible pour ces entreprises du numérique. Que ce soit, comme anciennement, grâce aux publicités ou désormais avec nos données. Le marché de la data est devenu mondial et se nomme l’économie de l’attention.
Un peu d’histoire.
Le nom « économie de l’attention » a émergé vers le début du XXe siècle. Gabriel Tard, un sociologue et psychologue, a formulé les premières réflexions autour de l’économie de l’attention. Il constatait déjà que la surproduction industrielle avait besoin de formes de publicités qui permettraient « d’attirer l’attention, la fixer sur la chose offerte ». Le chercheur Herbert Simon formulera ce concept avec des termes plus clairs en 1971 : « Dans un monde riche en informations, l’abondance d’informations entraîne la pénurie d’une autre ressource : la rareté devient ce que consomme l’information. Ce que l’information consomme est assez évident : c’est l’attention de ses receveurs. Donc une abondance d’informations crée une rareté de l’attention et le besoin de répartir efficacement cette attention parmi la surabondance des sources d’informations qui peuvent la consommer ».
Disons pour résumer que c’est le principe de l’offre et de la demande. Moins nous avons de temps à offrir et plus ce temps est précieux. Ainsi chaque part de marché de notre temps devient un petit trésor que les grands groupes tentent de s’accaparer. Comprenons que notre temps, notre attention est une source de revenus majeure, de plusieurs centaines de milliards ! Pour cela, tout est mis en œuvre, notamment le design persuasif. Soit capter notre attention par des stratagèmes d’ordre psychomoteur, de divertissement et de plaisir. Rien n’est fait au hasard… De notre téléphone, aux applications, à l’ergonomie des médias sociaux, aux cadeaux, jeux, jusqu’aux notifications. Nous tapotons sans nous arrêter sur nos écrans. Bienvenue au casino digital !
Comment ça marche ?
Prenons un exemple, celui d’Instagram, l’émotion est l’une des techniques principales activées par ce réseau. Sachant que la vision est le premier sens qui transmet des informations à notre cerveau, la concentration sur le partage d’images et de visuels ne pouvait qu’en faire une des apps ayant le plus de succès au monde. Son ergonomie est entièrement étudiée pour nous hypnotiser, en quelque sorte… Entre les « Likes », les partages, les photos avec filtre offrant une plus belle esthétique, le sentiment d’appartenance à la vie des autres, ainsi que la joie de se sentir apprécié. Nous ressentons un réel plaisir, jamais rassasié. C’est le principe de la récompense journalière. Tout comme avec l’application Snapchat qui nous offre des « streaks » si nous envoyons un « snap » par jour. Comme quoi, lorsqu’on y prend garde, on se rend vite compte des ficelles utilisées.
Et comment fonctionne Tinder, comment cette app a-t-elle été conçue ? Elle utilise toutes les ingénieries communes aux autres et a de plus la particularité de jouer avec nos affects les plus intimes. Elle ne fait pas mine ! Elle met un point d’honneur à vous rappeler plusieurs fois par jour que vous avez des « match », soit une personne intéressée. Elle joue avec votre cœur… Ainsi, par curiosité et un peu d’ego, nous voulons à tout prix découvrir qui est cette personne intéressée. Cependant, pour le savoir, il faut soi-même passer en revue plusieurs profils et donc faire des « match ». Vous comprenez la logique ? Que de temps perdu.
L’envoi de ce genre de notification est l’une des meilleures façons de détourner notre attention et d’en tirer profit
Il y a aussi le principe de rareté et de stress, comme évoqué précédemment. Les plateformes de réservation d’hôtel l’utilisent massivement. Leur « offre à durée limitée » où vous avez seulement 3 h 32 min pour profiter d’une réduction… Qui a en réalité lieu depuis deux mois ! Et continuera encore jusqu’à la fin de la basse saison.
C’est par ailleurs l’intérêt de cet article ! Car ces méthodes s’élaborent sur notre façon de penser, de réagir, sur les habitudes que nous avons. Pour pouvoir se défendre, il faut donc les connaître. Car à long terme, le design persuasif entrave fortement notre concentration, nos possibilités de réflexion critique, notre mémoire et aussi nos capacités de décision. Notre libre arbitre ! Jusqu’à compromettre la qualité de nos conversations et relations sociales. Il s’agit d’y remédier.
Des solutions.
On peut tous se mettre à la recherche du temps perdu… Les solutions existent pour trouver un bien-être digital, un équilibre. Changer ses habitudes demande toujours un peu de discipline. Certes. Mais n’est-ce pas essentiel ? On dit souvent que le temps, c’est de l’argent. C’est aussi du bonheur ! La question est : à qui le donner ? Aux multinationales du numérique ou à vous-même ?
Nous vous proposons ainsi à profiter de notre site dédié au digital Well-being, qui vous permettra d’en découvrir plus sur comment développer une meilleure relation avec la technologie. Action ! Découvrez nos formations.
Gabriel